Antidépresseurs et traitement du trouble paniqueTexte intégral extrait du chapitre "Antidépresseurs et traitement des troubles anxieux", recopié et commenté pour cause d'utilité publique. Par : Antoine PELISSOLO, Professeur des Universités, Praticien hospitalier, université Pierre-et-Marie-Curie; service de Psychiatrie adulte, hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris. Déclare des collaborations scientifiques ou pédagogiques ponctuelles avec les laboratoires Lilly, Eutherapie (b) et Lundbeck. Julien YADAK, Interne, service de Psychiatrie adulte, hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris. Déclare ne pas avoir de conflit d'intérêt en lien avec le texte publié. (a) Les renvois numériques par exemple "(1)" renvoient vers les notes bibliographiques de l'article original. Les renvois en couleur, par exemple "(a)", sont nos remarques. | PréfaceCet article est publié dans le dernier manuel de référence sur les antidépresseurs (ci-contre).
Voici la question implicitement posée aux auteurs pour ce chapitre important - 14 pages, 118 notes bibliographiques - de cet ouvrage. Pour des raisons de lisibilité et d'informatique, nous avons du décomposer ce chapitre en autant d'articles que de troubles anxieux traités. Le chapitre concerné n'a pas vocation à parler des effets secondaires, ni de neurophysiologie, sujets traités dans d'autres chapitres. Cet extrait a le mérite d'être très clair, assez pédagogique, ce qui n'est pas courant dans cet ouvrage. Nous complétons parfois ce qui nous semble manquer, et ajoutons de petites notes de lecture. Cet article ne remplace pas une consultation avec votre médecin, etc. | Les antidépresseurs - 2013 Chapitre 15 (a) La déclaration de liens d'intérêts est obligatoire depuis le 22 mai 2013 lors de toute communication écrite ou orale par un professionnel de santé des lors que la communication est liée à ces liens. Lire notre position sur ce sujet. L'éditeur et le directeur de collection ont encouragé la plupart de ses auteurs à ne pas respecter cette loi, en déclarant l'absence de conflit, très difficilement vérifiable. (b) Euthérapie est un fournisseur privilégié des laboratoires Servier. |
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IntroductionLa plupart des antidépresseurs aujourd'hui disponibles sont utilisés depuis environ 10 ans et, pour certains, beaucoup plus. Leurs propriétés antidépressives ont été découvertes de manière fortuite initialement et, par la suite, d'autres effets thérapeutiques ont été observés par les cliniciens chez des patients présentant des co-morbidités. Ce fut le cas en particulier pour l'action anxiolytique des tricycliques et des inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO), mise en évidence aux États-Unis et en Europe à partir des années 1960. Il fallut ensuite un temps assez long, parfois plus de 10 ans, pour vérifier que cet effet existait réellement de manière spécifique, c'est-à-dire indépendamment de l'effet antidépresseur. Il faut, en effet, bien distinguer deux cibles différentes : l'anxiété symptomatique d'une part, qui accompagne beaucoup de troubles psychiatriques dont la dépression, et les troubles anxieux (phobies, troubles obsessionnels-compulsifs, etc.) d'autre part, qui constituent des diagnostics à part entière. Nous n'aborderons ici que l'utilisation des antidépresseurs dans ces catégories de troubles anxieux bien identifiés, même s'il existe par ailleurs des données, certes moins nombreuses, sur leurs effets dans les dépressions anxieuses. (e) Les troubles anxieux sont des pathologies très fréquentes dans l'ensemble de la population. Leur sévérité est variable et leur retentissement peut aller, selon les sujets, d'une gêne modeste à un véritable handicap compromettant gravement l'adaptation sociale et l'équilibre personnel. Dans ces formes sévères générant une souffrance quotidienne et durable, il est bien souvent nécessaire d'avoir recours à un traitement médicamenteux, associé ou non à une prise en charge psychothérapeutique. Il existe alors deux grandes options pharmacologiques : les benzodiazépines qui visent un soulagement rapide mais sans effet prolongé sur la pathologie anxieuse, et les antidépresseurs. Ces derniers ont, comme dans la dépression, des effets retardés mais susceptibles de supprimer de manière durable les symptômes de la plupart des troubles anxieux chroniques. En effet, ils peuvent être efficaces dans tous les troubles anxieux sévères, en dehors des phobies spécifiques et de l'agoraphobie isolée (sans trouble panique). Mais cette efficacité est variable selon les classes pharmacologiques, et parfois même selon les produits, ce qui justifie un examen spécifique des données existantes et des conduites à tenir pour chaque diagnostic. Revenir au début | (e) La notion de "symptôme anxieux" dans un trouble dépressif, ou de "trouble dépressif anxieux", ne figure pas dans les classifications officielles. Il aurait été utile donc, de la part de ces auteurs, de mieux spécifier ces expressions. | |
II. Trouble panique (TP)Le trouble panique (g) est caractérisé par la survenue d'attaques de panique récurrentes et inattendues, qui s'accompagnent pendant au moins un mois d'une anxiété anticipatoire et de préoccupations persistantes sur les conséquences de celles-ci. Un réaménagement des conduites peut survenir, souvent sur un mode d'évitement agoraphobique. L'agoraphobie correspond à la crainte de se retrouver dans des lieux ou des situations dans lesquels il serait difficile de s'échapper et de se faire secourir ni nécessaire. L'attaque de panique se définit comme une période limitée d'anxiété ou de malaise très intense, atteignant rapidement son acmé (ndlr : paroxysme, apogée) en quelques minutes et se manifestant par une sensation angoissante de perte de contrôle, avec un emballement de symptômes physiques, notamment. Il s'agit d'une affection fréquente dans la population générale, avec une prévalence de 3 % sur la vie entière (62). La présentation clinique est souvent polymorphe, avec fréquemment d'autres troubles psychiatriques co-morbides : autres troubles anxieux, troubles de l'humeur, abus de substance et troubles de la personnalité. Les antidépresseurs sont étudiés dans le trouble panique surtout depuis les années 1980, même si la définition du trouble, par D. Klein initialement, reposait sur une « dissection pharmacologique » de l'ancien concept de "névrose d'angoisse" : l'anxiété généralisée répondant plutôt aux anxiolytiques et le trouble panique plutôt aux antidépresseurs (en traitement préventif des attaques de panique). Il s'agissait, à l'époque, uniquement des antidépresseurs imipraminiques ou des IMAO, mais de nombreuses autres molécules ont été testées ultérieurement, parmi les ISRS ou les inhibiteurs de recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNa). Revenir au début Efficacité des antidépresseurs dans le trouble panique (h)(j)
Revenir au début Modalités de prescriptionLe traitement médicamenteux préventif du trouble panique est indiqué dans les formes sévères, notamment lorsque les attaques de panique sont fréquentes, intenses ou qu'elles perturbent notablement la vie quotidienne (anxiété anticipatoire, agoraphobie secondaire, survenue lors d'activités importantes). Seuls les antidépresseurs permettent de traiter efficacement ces troubles (k). Ils sont d'autant plus indiqués qu'un état dépressif est associé au trouble panique, situation fréquente. Le schéma d'efficacité des antidépresseurs est en général du même type que dans la dépression, avec un délai de réponse variant entre 2 et 6 semaines en moyenne. Du fait de leur profil de tolérance favorable, les ISRS (escitalopram, citalopram, paroxétine) et la venlafaxine constituent des choix possibles en première intention. La clomipramine peut également être prescrite mais, en général, après plusieurs échecs d'antidépresseurs ISRS ou ISRNa. L'efficacité de ces différents antidépresseurs semble comparable dans le trouble panique, et aucune étude ne permet de recommander une molécule plutôt qu'une autre. Le choix de la molécule pour un patient donné peut tenir compte des antécédents de réponse préalable, des effets secondaires potentiels, du potentiel d'interaction médicamenteuse et des co-morbidités générales et psychiatriques. Au plan pratique, un élément essentiel est l'introduction très progressive des antidépresseurs. En raison probablement d'une sensibilité particulière de ces patients à certains effets sérotoninergiques, il existe en effet un risque d'aggravation des attaques de panique en début de traitement, mais aussi de beaucoup d'autres réactions négatives : troubles digestifs (nausées, diarrhée), sédation, insomnie, douleurs et autres troubles sensoriels, etc. Le syndrome jiteriness (nervosité, voire agitation, stimulation excessive) peut survenir dans ce contexte, proche d'un tableau de syndrome sérotoninergique. Même si cela n'a pas été étudié de manière précise, il est classique d'observer ce type de manifestations chez les patients présentant un trouble panique sévère, mais d'autant plus en cas de traits hypocondriaques voire histrioniques associés, et en cas de « pharmacophobie » (crainte, voire réticence extrême à la prise de médicaments). (l1) Pour ces raisons, et surtout pour éviter un arrêt intempestif du traitement en cas d'effets secondaires, il est essentiel de prévenir le patient des symptômes qui peuvent survenir et des moyens possibles pour y faire face : baisser temporairement la posologie ou espacer les prises, prendre un antinauséeux, voire un anxiolytique, etc. Il est important que le médecin propose une solution pour un contact ou une consultation rapide en cas de besoin. En ce qui concerne les posologies, la dose initiale doit correspondre à la dose la plus faible disponible, par exemple 10 mg de paroxétine ou 5 mg d'escitalopram. Des doses encore inférieures sont parfois nécessaires (quarts de comprimés ou solutions buvables), mais ces situations d'hypersensibilité permettent rarement d'obtenir ensuite une dose efficace car les effets secondaires sont souvent dose-dépendants. Les benzodiazépines ne sont pas indiquées dans le traitement préventif du trouble panique (l2). Elles peuvent parfois être prescrites en début de traitement, à la demande en cas de crise d'angoisse ou de manière continue, soit pour apaiser les effets secondaires initiaux des antidépresseurs, soit pour soulager le patient d'une partie de son anxiété dans l'attente de l'efficacité du traitement principal. Il faut cependant être très vigilant et prévenir le patient des risques de dépendance très élevés dans ce contexte (attachement rapide du fait du soulagement subjectif immédiat) et de la nécessité d'arrêter le traitement après quelques jours ou quelques semaines au maximum. La dose optimale est ensuite atteinte en 2 ou 3 semaines en moyenne, et il faut alors attendre 2 à 4 semaines supplémentaires pour évaluer les résultats thérapeutiques. L'évaluation de l'amélioration doit porter sur la fréquence et l'intensité des attaques de panique, le niveau d'anxiété anticipatoire, le degré de conduites d'évitement et d'agoraphobie ainsi que les différents retentissements sur la vie quotidienne. Le but n'est en effet pas seulement de supprimer les attaques de panique, mais aussi de rendre au patient son autonomie, ce qui nécessite souvent l'adjonction d'une aide psychothérapeutique, sous forme de TCC notamment. Il est aussi très important de ne pas négliger la persistance d'attaques de panique partielle ou pauci-symptomatiques (ne s'exprimant que par un ou deux signes somatiques, par exemple), dont il a été montré qu'elles prédisaient les risques de rechute. Leur présence peut justifier une intensification du traitement, voire un changement de molécule ou de stratégie thérapeutique. En cas de réponse insuffisante, la posologie peut être augmentée jusqu'à environ le double de la dose moyenne (40 mg/j de paroxétine, 150 à 225 mg/j de venlafaxine, 30 à 40 mg/j d'escitalopram). Au-delà de ces posologies, le risque d'intolérance est plus important que le bénéfice thérapeutique à en attendre. Une stabilisation clinique peut être obtenue en général en 8 à 12 semaines (82). Il est cependant très important de poursuivre ensuite le traitement pendant plusieurs mois afin d'éviter les risques de rechute (58). Deux facteurs limitant à un usage chronique doivent être connus et surveillés, comme dans la dépression, afin de prévenir les risques de mauvaise observance :
II n'existe pas de recommandations claires sur la durée optimale de traitement, en l'absence d'études systématiques à long terme. On peut cependant proposer les repères suivants, à adapter au cas par cas :
En cas de non-réponse ou d'amélioration insuffisante, il est justifié de changer d'antidépresseur et éventuellement de mécanisme d'action (ISRS, puis IRSNa, puis clomipramine). L'intérêt de l'association à une TCC n'a pas été formellement démontré pour tous les patients souffrant de trouble panique, mais l'expérience clinique montre l'intérêt de ces associations dans les formes sévères ou résistantes. (k1) En dehors de ces approches, il n'existe pas de stratégie de potentialisation clairement validée en cas d'échec des antidépresseurs dans le traitement du trouble panique. Revenir au début Notre avisSur le fondNous attendions un réel argumentaire équilibré, soulignant les avantages et inconvénients (le rapport "bénéfices/risques") des antidépresseurs dans le trouble panique. Nous n'avons pas eu cette analyse. L'article vise uniquement à affirmer, sans éléments convaincants, que : 1/ "Les AD sont efficaces", aucun chiffre n'étant cité. 2/ Ils ont des effets secondaires, leur gravité et leur fréquence pour la population étudiée n'étant pas donnée. On concèdera que d'autres chapitres de l'ouvrage traitent des effets indésirables. 3/ Ceux qui n'en veulent pas sont "hypocondriaques" ou "pharmacophobes". 4/ Il n'y a pas d'alternatives. Les TCC, alors que leur efficacité est reconnue scientifiquement, globalement supérieure dans le traitement du trouble panique (k1), sont juste évoquées pour minimiser leur intérêt en quelques mots. Il va donc falloir que des bénévoles (nous) cherchent les éléments chiffrés permettant de connaître la réalité du rapport risques / bénéfices de chaque AD dans le trouble panique. Sur la formeL'article est bien structuré et le lecteur est au moins respecté, à défaut d'être correctement informé. Neptune Revenir au début | (g) Trouble panique : définition DSM-IV(h) Produits cités dans cet articleAntidépresseurs anciens IMAO, imipraminiques ou tricycliques clomipramine :Anafranil (Sigma-Tau) nortriptyline : Nortrilen (Lundbeck) - (*) amitriptyline : Laroxyl (Teofarma) - (*) imipramine : Tofranil (Amdipharm) - (*) iproniazide : Marsilid (Primius) - (*) moclobémide : Moclamine (Biocodex) - (*) tianeptine : Stablon (Servier) - (*) brofaromine : Consonar - (*) Antidépresseurs ISRS paroxétine : Deroxat (GSK) citalopram : Seropram (Lundbeck) escitalopram : Seroplex (Lundbeck) sertraline : Zoloft (Pfizer) fluoxétine : Prozac (Lilly) (*) fluvoxamine : Floxyfral (Abott) (*) Antidépresseurs ISRNa ou atypiques venlafaxine : Effexor (Pfizer) duloxétine : Cymbalta (Lilly) - (*) mirtrazapine : Norset (MSD, génériques) - (*) miansérine : Miansérine (générique) - (*) bupropion : Zyban (GSK) - (*) Antidépresseurs non cités Aucun n'a d'indication pour ce trouble (*) pas d'AMM pour cette indication (j) Plus de 30 études sont citées, mais aucun chiffre n'est donné, ce qui ne permet pas de se donner une idée de ce que recouvre le terme "efficace" abondamment employé. Ceci ne peut que nous rendre suspicieux, et inscrire à notre programme de travail la vérification des chiffres, comme nous l'avons fait déjà pour certains antidépresseurs qui se sont révélés égaux aux placebos dans le traitement de l'épisode dépressif majeur. (7) ASNIS GM, HAMEEDI FA, GODDARD AW et al. Fluvoxamine in the treatment of panic disorder : a multicenter, double-blind, placebo-controlled study in outpatients. Psychiatry Res, 2001, 703 : 1-14 ( 8 ) BAKISH D, SAXENA BM, BOWEN R, D'SOUZA J. Réversible monoamine oxidase-A inhibitors in panic disorder. Clin Neuropharmacol, 1993, 16 (Suppl. 2) : S77-S82. (10) BALLENGER JC, WHEADON DE, STEINER M et al. Double-blind, fixed-dose, placebo-controlled study of paroxétine in the treatment of panic disorder. Am J Psychiatry, 1998, 755 : 36-42. (11) BANDELOW B, BEHNKE K, LENOIR S et al. Sertraline versus paroxétine in the treatment of panic disorder : an acute, double-blind noninferiority comparison. J Clin Psychiatry, 2004, 64: 405-413. 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L'auteur ne cite pas ses sources, et des études contestent également cette affirmation (k1) (k1) Voir Efficacité comparée de la pharmacothérapie et d'une TCC, extraits de l'ouvrage du Pr Ovide Fontaine, professeur honoraire à l'université de Liège (Belgique), et du Dr Philippe Fontaine, psychiatre à l'hôpital Vincent Van Gogh (CHU de Charleroi, Belgique) (63) LEPOLA UM , WADE AG , LEINONEN EV et al. A controlled, prospective, 1-year trial of citalopram in the treatment of panic disorder. J Clin Psychiatry, 1998, 59: 528-534. (68) LONDBORG P D , WOLKOW R, SMITH WT et al. Sertraline in the treatment of panic disorder : a multi-site, doubleblind, placebo-controlled, fixed-dose investigation. Br J Psychiatry, 1998, 773 : 54-60. (71) LYDIARD RB, MORTON WA, EMMANUEL NP et al. Preliminary report : placebo-controlled, double-blind study of the clinical and metabolic effects of désipramine in panic disorder. Psychopharmacol Bull, 1993, 29: 183-188. 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Nous avons consacré un chapitre entier à ce sujet, et fournissons des méthodes de sevrage pour chaque molécule. Voir notre chapitre Benzodiazépines |
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